TD5.  Les registres de langue

Objectif : -reconnaître les différents registres de langue.

1.      Définition : Lors de la production d’un texte, l’émetteur doit tenir compte du contexte, notamment de la relation qu’il entretient avec ses destinataires, du lieu où le texte est produit et de la visée. Il recourt donc à un registre de langue courant, familier/ populaire ou soutenu.

Les registres de langue sont constitués de variations dans l’emploi du vocabulaire (une bicoque, une maison, une demeure) et dans l’emploi des tournures (par exemple, l’inversion ou non du sujet et du verbe dans une phrase de type interrogatif).

Comme la variété de langue d’un locuteur peut changer d’une situation de communication à une autre, demandez-vous ce que cette variété vous apprend sur le locuteur lui-même ou sur la relation qu’il entretient avec le destinataire. Est-ce une relation de familiarité, d’intimité, de respect, de courtoisie, etc. ?

2.Les types de registre de langue : on distingue trois registres de langue : le registre courant, le registre soutenu et le registre familier.

2.1. Le registre courant (ou neutre) : est celui qu'on emploie dans la vie de tous les jours. Il correspond à un langage neutre et correct. Il est utilisé dans les situations de communication ordinaires.

Ex. : Il a acheté une belle voiture.

2.2. Le registre familier : Le registre familier est utilisé dans des situations quotidiennes dans lesquelles les interlocuteurs se connaissent et sont dans une relation plutôt égalitaire (famille, copains, collègues…).

Voici quelques-unes des caractéristiques de ce registre :

l’emploi de termes familiers : un clébard (pour un chien), un flic (pour un policier), le pognon (pour l’argent)…

l’utilisation d’abréviations : le prof, le psy, les maths, le ciné

l’emploi de certaines tournures syntaxiques :

-- négation incomplète : je sais pas (je ne sais pas), il veut pas (il ne veut pas)…

-- suppression du pronom sujet : faut (pour il faut) obéir à ce que je te dis, y a (pour il y a)…

-- utilisation du type de phrase interrogatif sans l’inversion du sujet et du verbe : Vous avez fini ?

à l’écrit, l’utilisation du style « texto » : tqt (t’inquiète), bjr sava ? (bonjour, ça va ?), bne n8 a12c4 (à un de ces quatre)…

à l’oral, la suppression de certaines voyelles, consonnes ou syllabes : main(ten)ant, les sou(l)iers

2.3. Le registre soutenu

Le registre soutenu est utilisé dans des situations très formelles (discours, conférences, séances officielles…) dans lesquelles les interlocuteurs ne se connaissent pas ou sont dans une relation plutôt hiérarchique (patron/employé, par exemple). A l’oral, ce sont les situations officielles, les conférences ; à l’écrit, on recourt fréquemment à ce registre soit parce que le texte produit appartient à un genre littéraire, soit parce qu’on cherche des formulations particulièrement précises, variées.

Voici quelques-unes des caractéristiques de ce registre :

l’emploi de termes peu usuels : le firmament (pour le ciel), la palingénésie (pour la renaissance), obsolète (pour désuet, qui n’est plus en usage), bailler (pour donner)…

l’emploi de constructions recherchées : Seriez-vous assez aimable pour m’accompagner ? pour (vous voulez m‘accompagner ?)

 

Le registre familier

Le registre courant          

Le registre soutenu

Vocabulaire

Arnaquer

En avoir marre

Tromper

En avoir assez

Duper

Se lasser

Syntaxe

Pas

que

Tutoiement

Tu veux venir ? Trop géniale, ton idée !

Ne…pas

Ne..que Tutoiement/vouvoiement Est-ce-que tu veux venir ? J’aime beaucoup ton idée !

Ne..pas, ne…point Ne…que Vouvoiement Voulez-vous venir ? Ton idée me ravit !

 

  1. Les argots et les autres langages codés

Les argots, le verlan par exemple, se distinguent des registres de langue (courant, familier, soutenu) dans la mesure où ils constituent souvent de véritables langages codés, difficilement compréhensibles pour ceux qui n'appartiennent pas au groupe des initiés.

A l'origine, ces dénominations ont été utilisées pour désigner la manière de parler de groupes particuliers, souvent en marge de la société (bandits, marchands ambulants[1], mendiants, etc.). Le codage est utilisé pour montrer que l'émetteur et le destinataire appartiennent au groupe et pour exclure de la communication toute personne n’en faisant pas partie.

Mais, aujourd'hui, ces manières de parler ont avant tout une fonction d'identification à un groupe.

Le verlan, fréquent aujourd’hui dans certains groupes, est un procédé argotique ancien qui s’est développé dans l’argot parisien des années cinquante. Il consiste à inverser les syllabes : laisse béton pour laisse tomber, titre d’une chanson de Renaud ; un ripou pour un pourri, etc.

L’argot remplace plutôt les termes par d’autres termes (becqueter, bouffer, cartoucher, casser la croûte, claper, croûter, galimafrer, etc. pour manger), utilise des expressions imagées (casser la dalle, casser la graine, pour manger).

Un bon nombre de termes argotiques sont entrés dans la langue familière : par exemple, un poulet pour un policier, un casse pour un cambriolage.

 

Le jargon est une façon de s’exprimer propre à une profession (le jargon des médecins), à une activité (le jargon des « snowboarders »), à une science (le jargon scientifique), difficilement compréhensible pour le non-initié.

 

 

 

 Applications

 

Application 1 : Dites à quel niveau de langue appartient chacune des phrases suivantes (soutenu /courant/familier)

  • Tu l'as mis où ton pull ?
  • Cessez de m'importuner, je vous prie.
  • Ca va pas non?
  • Il est interdit de fumer.
  • Lâche moi la grappe.
  • Souriez, vous êtes filmé.
  • Il a dilapidé des biens considérables.
  • C'est vraiment un drôle de type.

Application 2 : Trouve un synonyme en langage courant de ces verbes appartenant au langage soutenu.

  • Se restaurer =
  • Rédiger =
  • S’esquiver =
  • Lacérer =
  • Tressaillir =
  •  Se fourvoyer =
  •  Dérober =
  •  Résider =
  • Feindre =
  • Se morfondre =
  • Hausser =
  • S’assoupir =

Application 3 :  Dans les textes 1 et 2 indiquez le registre de langue en justifiant la réponse.

Texte 1

« ... le soir s’émerge, hibou clignotant, dans la ville, dans la vie, qu'est pas ta ville, qu'est pas ta vie, t'es étranger à tout çà, le hibou qui passe, qui clignote vers son plumard pour se refaire des forces pour bosser demain, discuter avec les potes au coin de la rue j'avais pas envie, ça me crevait le cœur, j'étais plus d'ici, j'avais passé la ligne... »

François Cavanna, Les Ritals 1978, Ed. Belfond

Texte 2

«A six heures, il reste encore un peu de jour, mais les lampadaires des boulevards brûlent déjà. J'avance lentement, respirant à fond l'air de la rue comme pour y retrouver une vague odeur de mer. Je vais rentrer, m'étendre, glisser le traversin sous mes chevilles. Me coucher... J'achèterai n'importe quoi, des fruits, du pain, et le journal. Il y a déjà trente personnes devant moi qui attendent le même autobus, »

Claire Etcherellie. Elise ou la vraie vie. 1967. Ed Denoël

 Application 5 : Montrez comment ce texte mêle différents registres.

Texte

 - On va dormir ?

- Je ne sais pas.

- J'ai faim.

- T'es pénible, Antoine.

En me penchant jusqu'à la taille contre la pierre de la fontaine, j'ai cherché mon visage tartiné de mousse dans le miroir de l'eau. Puis j'ai brouillé mon reflet en rinçant le rasoir. Mister Laurence, allongé sur un banc, préfère s'éventer avec son bouquin sur le protocole, diplomatique plutôt que répondre à mes questions.

" On prend le soleil dans le jardin des Tuileries et la nuit à venir s'annonce plutôt bien. (…)

Quand j'ai fini de lisser la joue gauche, je plonge la tête dans le bassin et me frotte le visage en maudissant les gens éternellement glabres, comme Mister Laurence.

Si j'avais quarante francs à perdre, je le planterais là, lui et son indolence, son goût insupportable pour la douceur des éléments, son abandon lascif au temps qui passe.

Tonino BENACQUISTA, Les Morsures de l'aube.

 Corrigé:

Corrigé

Application1 :

  • Tu l'as mis où ton pull ?  Cette phrase orale appartient à un registre familier du fait de l'ordre des mots, qui serait incorrect à l'écrit (Où as- tu mis ton pull ?).
  • Cessez de m’importuner, je vous prie. Registre soutenu.
  • Ça va pas non ? Registre familier à cause de l'omission de ne.
  • Il est interdit de fumer. Registre courant.
  • Lâche moi la grappe[1]. Expression argotique, registre populaire.
  • Souriez, vous êtes filmé. Registre courant.
  • Il a dilapidé des biens considérables. Registre soutenu.
  • C'est vraiment un drôle de type. Registre courant.
Application2 :
  • Se restaurer = Manger
  • Rédiger = écrire
  • S’esquiver = s’échapper
  • Lacérer =entailler  (couper)
  • Tressaillir = sursauter (faire un sursaut=mouvement involontaire qui fait qu’on se dresse brusquement)
  •  Se fourvoyer = se tromper
  •  Dérober = voler
  •  Résider = habiter
  • Feindre = mentir
  • Se morfondre = pleurer
  • Hausser = lever
  • S’assoupir = s’endormir

Application 3 :

Registre de langue familier : - tutoiement = « t’, ta » - vocabulaire familier = « çà », « plumard », « bosser », « potes », « crevait le cœur » - syntaxe simplifiée (suppression du ne= « qu’est pas ta ville », « qu’est pas ta vie », « j’avais pas envie », « j’étais plus d’ici », « j’avais passé la ligne » Objectif :

  • · Langue parlée
  • · Désir de voir le monde par les yeux de gens simples.

Application4

- Registre de la langue courante :

- vocabulaire courant facile à comprendre = « lampadaires », « odeur de mer », « rentrer », « m’étendre »

- syntaxe simple et fluide = « J’avance lentement, respirant à fond l’air de la rue, […] »

- emploi de subordonnée = « Il y a déjà trente personnes devant moi qui attendent le même autobus »

- Objectif :

  • · Illusion réaliste

 · Transmettre une vision du monde réel.

 

Application5  

 Ce texte au style contrasté comporte en effet des éléments qui relèvent :

- du registre familier, comme le dialogue du début (où on va dormir, t'es pénible, c'est la syntaxe relâchée du langage oral), et les expressions suivantes : visage tartiné de mousse, Mister Laurence, qui est un anglicisme, bouquin;

- du registre soutenu (glabre[1], abandon lascif[2] au temps qui passe) ;

- du registre courant (le reste du texte).

 

 

 

 



[1] Qui est sans poils.

[2] Fortement enclin aux plaisirs amoureux.



[1] Laisse moi tranquille



 

Modifié le: lundi 22 mai 2023, 10:05